Se sentir maltraité, dévalorisé ou humilié de manière répétée au travail n’est jamais anodin. Pourtant, de nombreux salariés hésitent à agir, par peur de représailles ou parce qu’ils doutent de la gravité des faits.
Mais quand faut-il porter plainte pour harcèlement moral au travail ? À partir de quels signes est-il légitime de réagir ? Et quels sont les délais légaux pour saisir les juridictions compétentes ?
Dans cet article, nous vous expliquons les bons réflexes à adopter, le cadre juridique, et les étapes clés pour faire reconnaître une situation de harcèlement moral.
Que recouvre le harcèlement moral au travail ?
Avant de porter plainte, il est important de vérifier si la situation correspond bien à la définition légale du harcèlement moral.
Pour une explication complète des comportements concernés, des exemples concrets et de la loi encadrant ce phénomène, consultez notre article dédié :
Harcèlement moral au travail : qu’est-ce que c’est ? Comment le reconnaître et réagir ?
À partir de quand peut-on porter plainte pour harcèlement moral ?
Il n’existe pas de moment « parfait » pour agir, mais certains signaux doivent vous pousser à ne pas attendre.
Les premiers signes à prendre au sérieux :
- Vous vous sentez humilié·e, mis·e à l’écart, dénigré·e ou constamment critiqué·e sans justification.
- Votre état de santé se dégrade (stress, insomnie, anxiété, dépression…).
- Vos collègues vous soutiennent ou s’inquiètent de votre situation.
- Vous redoutez d’aller travailler, vous perdez confiance en vous.
Ces éléments sont des signaux d’alerte sérieux : ne minimisez pas vos ressentis. Même si les faits vous paraissent isolés, c’est leur répétition et leur impact sur vos conditions de travail qui peuvent caractériser un harcèlement.
📌 vous n’avez pas besoin que la situation soit dramatique pour agir. Dès les premiers signes persistants, il est recommandé de commencer à constituer un dossier.
Quels sont les délais pour porter plainte ou agir en justice ?
La loi prévoit plusieurs types de recours, avec des délais différents selon la juridiction saisie.
Devant les prud’hommes (harcèlement au sens du droit du travail)
- Délai de prescription : 5 ans à compter des derniers faits de harcèlement.
- Ce recours permet de :
- Demander la résiliation du contrat de travail aux torts de l’employeur.
- Obtenir des indemnités pour préjudice moral.
- Faire reconnaître un licenciement abusif si le salarié a été sanctionné après avoir signalé les faits.
Au pénal (plainte pour harcèlement moral, article 222-33-2 du Code pénal)
- Délai de prescription : 6 ans à compter des faits.
- Le harcèlement moral est un délit passible de :
- 2 ans d’emprisonnement
- 30 000 € d’amende
🎯 Les deux procédures peuvent être engagées en parallèle (prud’hommes + plainte pénale), selon la gravité des faits et la stratégie choisie.
Comment se préparer avant de porter plainte ?
Le succès d’une action repose souvent sur la qualité des éléments de preuve et la stratégie adoptée en amont.
1. Rassemblez des preuves concrètes
- Emails, SMS, enregistrements vocaux (dans le respect de la loi)
- Certificats médicaux mentionnant un trouble lié au travail
- Témoignages écrits de collègues ou ex-collaborateurs
- Comptes rendus d’entretien, avertissements abusifs, etc.
- Tenez un journal de bord détaillé : date, faits, contexte, témoins.
2. Parlez-en à un interlocuteur de confiance
- Médecin du travail : il peut constater une altération de votre santé et alerter l’employeur.
- Représentant du personnel (CSE) ou syndicat : il pourra vous accompagner dans les démarches.
- Inspection du travail : vous pouvez faire un signalement, même anonymement.
3. Alertez votre employeur par écrit (recommandé)
La loi impose à l’employeur une obligation de prévention. Il doit enquêter et prendre des mesures.
💡 À ce stade, vous n’avez pas encore besoin d’un avocat, mais son aide peut être précieuse pour cadrer votre stratégie, surtout si une procédure judiciaire est envisagée.
Et si je suis en arrêt maladie, puis-je quand même porter plainte ?
Oui. Un arrêt maladie, qu’il soit lié ou non au harcèlement, n’empêche pas d’agir :
- Il permet de faire constater médicalement votre état de santé.
- Il peut servir de preuve de l’impact psychologique du harcèlement.
- Il vous protège temporairement du retour sur le lieu de travail en attendant une décision ou une médiation.
⚠️ En revanche, si vous êtes en arrêt long, assurez-vous de respecter les horaires de sortie et de pouvoir justifier toute démarche extérieure (rendez-vous juridique, dépôt de plainte…).
Quels risques prend-on en dénonçant un harcèlement ?
C’est une question fréquente et légitime.
Vous êtes protégé·e par la loi :
- L’article L1152-2 du Code du travail interdit toute sanction ou licenciement pour avoir signalé un harcèlement, même si les faits ne sont pas reconnus à la fin.
- En cas de licenciement en représailles, il peut être requalifié en licenciement nul, avec réintégration ou indemnisation.
🎯 Plus vous agissez calmement et méthodiquement, plus vous serez crédible et protégé juridiquement.
FAQ
Puis-je porter plainte anonymement ?
Non, pas au pénal. Mais vous pouvez signaler la situation de manière confidentielle à l’inspection du travail ou à un avocat.
Dois-je aller au commissariat pour porter plainte ?
Oui, ou écrire directement au procureur de la République. Vous pouvez également demander à votre avocat de transmettre la plainte.
Est-ce trop tard si j’ai quitté l’entreprise ?
Non. Tant que les faits ont moins de 5 ans, vous pouvez toujours engager une action en justice.
Puis-je obtenir des indemnités ?
Oui, via les prud’hommes. Vous pouvez réclamer des dommages et intérêts pour préjudice moral, un rappel de salaire, ou la nullité d’un licenciement abusif.
Le bon moment pour agir, c’est maintenant
Attendre « trop longtemps » pour dénoncer un harcèlement moral est la principale erreur des salariés victimes. Il n’est jamais trop tôt pour commencer à documenter, alerter et se faire accompagner.
N’agissez pas seul·e. Entourez-vous, consultez les bonnes personnes, et défendez vos droits dans le respect de la loi.
📞 Vous pensez être victime de harcèlement moral ? Contactez un avocat en droit du travail pour un accompagnement confidentiel et personnalisé.